Souveraineté alimentaire : l’agro-industrie veut faire mieux

Souveraineté alimentaire : l’agro-industrie veut faire mieux

Le succès des entreprises de l’agro-industrie nécessite plusieurs prérequis. En première ligne se trouve «l’inscription de l’innovation dans les stratégies des entreprises, l’amélioration continue de la qualité, devenue indispensable, et la réalisation d’économies dans la consommation des intrants», indique Youssef Fadil, directeur des industries agroalimentaires au sein du ministère de l’Industrie et du commerce. Fadil intervenait, jeudi, lors d’une rencontre virtuelle sur le thème «L'Agro-industrie : Un essai à transformer», organisée dans le cadre du cycle de Rencontres du Livre Blanc, par la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM) en partenariat avec la Fédération nationale de l'agroalimentaire (FENAGRI).

Pour réussir, recommande, pour sa part, Brahim Laroui, DG Lesieur-Cristal, il faut également renforcer la compétitivité énergétique de ces entreprises et attirer les investissements dans la sous-traitance pour renforcer les écosystèmes. «De leur côté, les entreprises doivent respecter l’effort budgétaire de l’État et ne pas en abuser. Les incitations doivent être ciblées. Lorsque la production devient suffisante dans une filière, elles doivent être réorientées vers la valorisation des produits finis», préconise-t-il.

Cette valorisation des produits finis au Maroc et à l’international est aussi du ressort de l’ONSSA qui veille à la conformité du Made in Morocco aux standards les plus avancés. Et le projet de loi modifiant et complétant la loi n°28.07 relative à la sécurité sanitaire des produits alimentaires donne plus de pouvoir à cet office pour participer pleinement au renforcement de la compétitivité des entreprises et au maintien d’une bonne image des produits marocains à l’international. Ainsi, rappelle Abdelghni Azzi, directeur du contrôle des produits alimentaires de l’ONSSA, ce projet de loi apporte des changements, entre autres, dans la prévention de la fraude, introduit la possibilité d’arrêt de l'activité lors du retrait ou de la suspension de l’agrément et précise les conditions de vente des produits alimentaires en ligne.

Renforcer l’intégration amont-aval pour valoriser les produits agricoles

Dans son Livre Blanc, la CGEM rappelle que l’agro-industrie représente 5% du PIB marocain, 25% du PIB industriel et 19% des emplois industriels du pays, soit 162.000 emplois. L’industrie de transformation alimentaire génère un chiffre d’affaires annuel de plus de 160 milliards de DH et peut faire mieux. À condition de s’affranchir des problèmes qui le freinent. À leur tête, celui de l’inadéquation approvisionnement en matières premières-capacité de transformation. «Le taux d’intégration actuel varie entre 15 et 20%. L’objectif de la stratégie Generation Green est d’atteindre 70% à l’horizon 2030», rappelle Abdelmounim EL Eulj, président de la FENAGRI. Dans des filières comme celle des oléagineux, notamment les huiles de table, l’industrie de transformation est suffisamment dimensionnée pour combler les besoins nationaux. Mais c’est l’alimentation en matières premières qui fait défaut. «C’est une filière qui affiche un taux de pénétration de 100% auprès des ménages. Pourtant, en 2021, elle a importé 97% de ses besoins en matières premières malgré un potentiel agricole avéré. L’idéal serait de n’importer que 25% de ces besoins et d’en produire le reste au Maroc», espère Brahim Laroui. Dans d’autres filières, en revanche, comme celle des agrumes, c’est l’inverse : «Avec toute la production nationale d’agrumes du pays, l’industrie des jus continue à importer l’essentiel de ses besoins en concentré de jus», se désole Youssef Fadil. Il est clair donc qu’il faut développer davantage la production agricole dans certaines filières et augmenter le nombre d’unités industrielles dans d’autres.

Un écosystème «Export» pour accompagner les TPME

Les exportations des produits alimentaires transformés, composées principalement de poissons, de fruits et légumes et d’huile d’olive, représentent actuellement 15% des exportations industrielles. De par leurs tailles et leurs moyens financiers, les très petites et petites industries se focalisent plutôt sur la production que sur le développement d’un réel circuit de distribution notamment à l’étranger. Et quand elles arrivent à vendre à l’international, c’est souvent en vrac. L’exemple le plus éloquent est celui de l’huile d’olive. Pour Brahim Laroui, il est important d’encadrer ce type d’industriels pour augmenter leur capacité à produire plus de valeur ajoutée. Comment ? D’abord en les accompagnant pour «brander» leurs produits. Ensuite, en les aidant à trouver des clients à l’international. «Nous avons identifié une centaine d’opportunités à l’étranger.

Au Maroc, nous effectuons une analyse du potentiel à l’export des entreprises que nous approchons suite auquel un plan d’action est mis en place», explique Meryem Kabbadj, en charge de la direction Export à l’Agence marocaine de développement des investissements et des exportations (AMDIE). De son côté, la facilitation des procédures à l’export accélère le processus d’exportation. Et c’est dans cet esprit que «la digitalisation a été adoptée pour aider les PME et TPE à l’export», rappelle El Mehdi El Alami, directeur de la promotion et du développement au Morocco Foodex. Enfin, l’ONSSA joue son rôle de garant de la qualité des produits marocains vendus à l’international. «Nous jouissons d’un capital confiance auprès de plusieurs autorités de contrôle à l’étranger. Quand, par exemple, nous contrôlons un produit au Maroc, il est admis sans difficultés en Allemagne», partage, non sans fierté, Azzi. Combinés, tous ces efforts convergent vers un seul objectif : placer le Maroc comme origine crédible.